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À l’origine des ondes cérébrales

mardi 30 juillet 2013

par Safi Douhi

Des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Lausanne ont développé un modèle informatique reproduisant les ondes générées par le cerveau.

Pendant près d’un siècle, les neuroscientifiques ont étudié les ondes cérébrales pour décrypter les désordres neurologiques ou tenter de comprendre comment nous pensons. Pour autant, on ne comprend pas encore comment nos milliards de neurones interconnectés collaborent pour produire ces signaux. Des chercheurs suisses du Blue Brain Project, au cœur du projet européen Humain Brain Project, et leurs confrères américains de l’Allen Institute for Brain Science, ont montré qu’un modèle informatique complexe peut fournir les bases d’une nouvelle approche, susceptible de résoudre ce mystère.
Pour l’heure, les scientifiques étudient les tissus cérébraux du rat et caractérisent dans les moindres détails différentes sortes de neurones en enregistrant leurs propriétés électriques, leurs formes, leurs tailles et leurs interconnections. Le travail des chercheurs de l’EPFL et de l’Institut Allen repose sur un modèle informatique qui englobe une quantité inédite de détails pour environ 12 000 neurones.
Grâce à leur modèle, les scientifiques se sont aperçus que l’activité électrique de l’ensemble du système était dans une très large mesure analogue aux ondes cérébrales mesurées in vivo chez les rongeurs. La simulation informatique intégrant un nombre inédit de données physiques, chimiques et biologiques, les ondes cérébrales peuvent désormais être analysées avec un niveau de complexité impossible à atteindre avec des mesures effectuées sur des tissus cérébraux réels.
« Il nous faut un modèle informatique précisément parce qu’il est impossible d’analyser simultanément l’activité électrique de milliards de neurones individuels et les ondes cérébrales qui en résultent, explique Sean Hill, de l’EPFL. Le modèle nous donne les moyens d’interpréter, à l’échelle d’un neurone individuel, les ondes cérébrales telles qu’elles sont mesurées sur un tissu, au laboratoire. »
Pour les scientifiques, le principal défi consistait à intégrer dans leur simulation une quantité extrêmement élevée de paramètres – plusieurs milliers – décrivant le comportement électrique de chaque neurone. Ils ont constaté que l’activité électrique globale de leur modèle est comparable à celle des cerveaux de rats, leur donnant de
précieux indices sur les causes sous-jacentes des ondes cérébrales.
« Notre modèle est encore incomplet mais il y a des similitudes frappantes entre les signaux électriques produits par la simulation informatique et les mesures effectuées sur des cerveaux du rat », explique Costas Anastassiou, de l’Allen Institute for Brain Science. « Pour la première fois, nous avons pu démontrer que le comportement complexe des canaux ioniques sur les branches des neurones influence directement la forme des ondes cérébrales », estime Sean Hill.
Mais même si les signaux électriques générés par le modèle sont analogues aux mesures effectuées in vivo, il reste de nombreuses questions. Ainsi, si la simulation est calquée sur les neurones qui contrôlent les membres postérieurs, les données relevées sur les
animaux vivants se basent sur des ondes cérébrales provenant de neurones à la fonction similaire mais dédiés au contrôle des moustaches. « Le modèle informatique utilisé nous a permis de définir et, surtout, de quantifier les caractéristiques fondamentales de la production de signaux électriques par les neurones », précise
Costas Anastassiou.
En simulant l’activité électrique du cerveau et en mettant au jour les relations entre ondes cérébrales et comportement des neurones, les chercheurs espère permettre l’émergence de meilleurs outils de diagnostic des désordres neurologiques.

Reimann MW et al. (2013) Neuron 79, 375-90


(En anglais)

Photo : Simulation d’ondes cérébrales produites par 100 modèles détaillés de neurones. La puissance du signal est indiquée en courleur : en vert, signal faible ; en jaune, signal moyen, en rouge, signal fort.

Source : EPFL
© EPFL, Blue Brain Project

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