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Briller pour être vu ou se camoufler

mercredi 20 mars 2013

par Agnès Vernet

La bioluminescence des requins Etmopterus spinax leur permet à la fois de se camoufler et de repousser des prédateurs.

La bioluminescence reste un phénomène peu connu. On ne comprend pas finement ses mécanismes chimiques et on ne sait pas toujours expliquer sa fonction écologique. Des travaux menés par Julien Claes, au cours d’un contrat post-doctoral à l’Université catholique de Louvain, en Belgique, sur un petit requin, le sagre commun (E. spinax), montrent que selon l’emplacement des zones de bioluminescence le message peut-être très différent.
Ainsi, lors de sa thèse, le jeune chercheur avait déjà démontré que la bioluminescence ventrale permet à E. spinax de se confondre avec la lumière ambiante et d’être camouflé lorsqu’il mène une attaque par le dessus. Il met en lumière aujourd’hui une autre zone morphologique luminescente et propose une fonction écologique complètement différente. À l’occasion d’un voyage d’étude en Norvège, Julien Claes a observé que les épines dorsales du petit requin émettent de la lumière. L’étude histologique de ces tissus révèle la transparence des structures osseuses, qui laissent apparaître les photophores sous-jacents. L’analyse des caractéristiques optiques de cette luminescence, associée à une théorie récente qui met en exergue l’importance de la vision dans les relations interespèces en profondeur, a permis à Julien Claes et ses collaborateurs de l’Institut des colloïdes et des interfaces de Postdam et de l’Université de Lund en Suède, de déterminer la distance à laquelle ces structures dorsales peuvent être repérées : elles sont visibles par les autres poissons ou mammifères à plusieurs mètres.
Grâce à une approche intégrative, liant l’étude structurale des organes, leurs performances optiques et la modélisation de l’ensemble dans le contexte écologique, les chercheurs ont ainsi pu proposer une fonction pour cette bioluminescence : étant visible de loin dans les eaux sombres, les épines dorsales lumineuses seraient des outils défensifs. Elles informeraient à distance les autres prédateurs de la présence d’E. spinax et les dissuaderaient de s’aventurer dans le secteur. Ces recherches proposent une méthode multidisciplinaire pertinente pour étudier des animaux trop fragiles pour être arrachés à un milieu difficile d’accès pour l’homme.

Claes JM et al. (2013) Sci Rep, doi:10.1038/srep01308

E. spinax sur lequel on remarque les épines dorsales luminescentes.
© J. Mallefet FNRS-UCL

E. spinax et ses épines dorsales luminescentes

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