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Des ARNsi antiviraux chez les mammifères...?

lundi 14 octobre 2013

par Agnès Vernet

Déjà controversées, des recherches suggèrent l’existence d’une stratégie antivirale à partir d’ARN interférents chez des mammifères.

La capacité à se défendre des attaques virales par des petits ARN interférents (ARNsi pour small interfering) est clairement établie chez les végétaux et les invertébrés. Mais du côté des mammifères, impossible de la mettre en évidence. Les ARNsi sont bien utilisés par les cellules mammifères mais uniquement à des fins de régulation génique, d’après les données expérimentales accumulées jusqu’à aujourd’hui. La défense antivirale semble, elle, assurée par les interférons. Cette analyse est largement bousculée par de récentes recherches menées au sein de l’Institut fédéral suisse de technologie de Zurich et de l’Université de Californie à Riverside.
Un premier groupe de chercheurs signale la présence d’ARNsi antiviraux chez des cellules souches embryonnaires de souris, choisies car dépourvues d’interférons et du mécanisme de régulation génique impliquant les ARNsi mais pas de la machinerie moléculaire nécessaire à la mise en œuvre des ARNsi antiviraux (1). Lorsque ces cellules indifférenciées sont infectées par le virus à ARN de l’encéphalomyocardite, les chercheurs observent l’accumulation d’ARN ressemblant au génome viral, dont la taille est comprise entre 21 et 23 nucléotides d’après le séquençage à haut débit. Lorsqu’ils provoquent une infection avec le virus Nodamura – connu pour son système bloquant les ARNsi antiviraux –, ils n’observent pas cette accumulation d’ARN et les cellules meurent. Si le virus Nodamura est muté afin d’annihiler son système anti-ARNsi, les cellules survivent et la signature des petits ARN est à nouveau enregistrée.
Un second groupe de recherche semble avoir mis en évidence des ARNsi antiviraux chez des souriceaux de 7 jours infectés avec le virus de Nodamura (2). Sans mutation, le virus tue rapidement les animaux. Mais s’il est muté, la charge virale baisse et les souriceaux survivent. Des animaux plus âgés résistent à l’infection en activant la voie des interférons.
Selon les scientifiques, l’âge des cellules est la clé pour expliquer que ce mécanisme n’a jamais été mis en évidence auparavant. Lorsque les cellules de mammifères n’ont pas encore accès à l’interféron – qui n’apparaît qu’après un certain stade de différenciation –, elles pourraient s’appuyer sur les ARNsi très conservés au cours de l’évolution. Dans cette hypothèse, les jeunes souriceaux présenteraient encore des traces des mécanismes immunitaires fœtaux.
Ces recherches font néanmoins l’objet de vives critiques. Les uns opposant l’absence d’intérêt de systèmes ARNsi antiviraux chez des cellules souches non visées par les virus et les autres relevant des faiblesses scientifiques dans les deux articles (3). La confirmation ou l’infirmation de l’existence d’un mécanisme antiviral chez les mammifères est donc suspendue jusqu’à la publication de nouveaux travaux.

(1) Maillard PV et al. (2013) Science 342, 235-8
(2) Li Y et al. (2013) Science 342, 231-4
(3) Maxmen A (2013) Nature doi:10.1038/nature.2013.13600

© avec l’aimable autorisation de Ding SW et Voinnet O

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