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Du polymorphisme nucléotidique contre la pêche frauduleuse

mardi 17 juillet 2012

par Agnès Vernet

Repérer l’origine des poissons est un enjeu de taille dans la lutte contre la pêche frauduleuse. Le polymorphisme nucléotidique répond à ce problème avec de 93 à 99 % de réussite selon les espèces.

Ce poisson a-t-il été pêché légalement ? Une question délicate à poser chez son poissonnier. Mais – plus grave – la réponse est encore plus difficile à vérifier pour les instances de contrôle. Car si de nombreux pays (dont les membres de l’Union européenne) sont aujourd’hui dotés d’un arsenal législatif et répressif pour lutter contre la pêche frauduleuse, les tests permettant de vérifier l’origine géographique des poissons sont assez peu fiables : puissance statistique faible, problème de standardisation des procédures, hétérogénéité des résultats entre les méthodes… les écueils sont multiples. Pour résoudre cette question, un collectif de chercheurs européens et américains a développé une méthode génomique de localisation de l’origine du poisson.
En effet, les poissons de mer ont une très grande capacité d’adaptation au milieu. Une poignée de gènes reflètent cette variabilité. Déterminer des marqueurs pertinents permettrait à la fois d’identifier l’origine géographique des individus et d’améliorer notre connaissance sur leurs déplacements. Einar Nielsen et son équipe ont ainsi développé une méthode d’analyse des polymorphismes de nucléotide unique sur quatre espèces majeures dans les enjeux commerciaux : le cabillaud – dont les populations de l’Arctique nord-est et de l’est de la Baltique prospèrent tandis que celle de la mer du Nord s’appauvrit –, le hareng – pour lequel il n’existe aucune méthode permettant de différencier les poissons de la mer du Nord et de l’Atlantique nord –, la sole – dont les stocks de l’Atlantique nord sont très affaiblis – et enfin, le colin – qui pose des problèmes de contrôle, les tailles légales de pêche variant selon l’origine méditerranéenne ou atlantique des individus.
À partir de dizaines d’échantillons pour chaque espèce provenant de localisations plus ou moins variées, les chercheurs ont identifié des marqueurs nucléotidiques pertinents. La vérification de ces marqueurs en double aveugle a permis de retrouver la provenance sans ambiguïté de 69 des 70 cabillauds testés, 161 des 163 harengs, 149 des 160 soles et 751 des 756 colins. Cette approche semble donc très puissante statistiquement.
De plus, les chercheurs signalent dans Nature Communications que la méthode pourrait assez facilement remplir les clauses nécessaires à sa validation par une institution comme l’Union européenne au vu du faible nombre de marqueurs nécessaires, 19 nucléotides uniques pour la sole par exemple. Un simple contrôle de nucléotide serait donc un système antifraude efficace.

Nielsen EE et al. (2012) Nat Commun 3, 851

Cabillaud de l’Atlantique (Gadus morhua)
© Zelenko E. via Wikimedia Commons

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