L’évolution, une question de tolérance

Comprendre l’évolution, c’est aussi identifier les mécanismes moléculaires qui la favorise. Les mutations génétiques, si elles sont une forme efficace et directe d’évolution, peuvent mettre en péril la survie de l’individu. Les sites de liaison des gènes aux facteurs de transcription constituent une cible alternative pour modifier les phénotypes. Une idée illustrée par les travaux de chercheurs de l’Université de Zurich sur la capacité des séquences de ces sites à subir des modifications sans perdre leur fonction initiale.
Pour évaluer la robustesse des séquences au regard de leur capacité à évoluer – leur « évolutionnabilité » –, les chercheurs ont étudié plusieurs génomes de souris et de levures. Ils ont ainsi analysé 193 sites de liaisons de facteurs de transcription en créant des réseaux de génotypes, permettant de visualiser les relations entre plusieurs séquences qui ne diffèrent que par un seul nucléotide. Ces travaux révèlent que les sites qui se lient le plus fréquemment aux facteurs de transcription présentent la plus grande tolérance aux variations de nucléotides. En revanche, les moins robustes sont bien moins sollicités par ces facteurs. Or les petites modifications sur un site peuvent conduire à d’importants changements de niveaux d’expression des gènes que contrôlent ces signaux de transcription. Il s’agit donc d’une source importante de diversité génétique. Les chercheurs concluent ainsi que la robustesse d’une séquence de régulation de l’activité génique faciliterait directement l’évolutionnabilité. Bref, la tolérance aux changements favoriserait le changement. Un concept qui enrichit la compréhension des mécanismes moléculaires de l’évolution.

Payne JL & Wagner A (2014) Science 343, 875-7