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La génomique prévoit les épidémies de grippe

vendredi 28 février 2014

par Agnès Vernet

Un modèle bio-informatique prédit l’évolution de la grippe A H3N2, une des principales responsables des épidémies saisonnières.

Pour les Oscars, il y a les nominés et les lauréats. Dans le cas de la grippe saisonnière, les souches virales nominées pour la prochaine épidémie sont proposées par l’Organisation mondiale de la santé, qui édicte des recommandations à destination des fabricants de vaccins basées sur les données épidémiologiques de l’année précédente, en particulier sur la dynamique des variétés des grippes A et B. Mais contrairement aux célébrations artistiques, ici, rien ne garantit que les lauréats auront bien été nominés : dans le monde microbien, aucune loi n’interdit, en effet, que l’Oscar du meilleur virus soit décerné à un simple figurant ou même à un inconnu, des variants émergents pouvant parfaitement dominer une saison épidémique. Or le système de prédiction actuel s’appuie sur les souches existantes sans prendre en compte l’apparition de nouvelles souches, alors que la famille des Orthomyxoviridæ – qui comprend cinq genres dont celui des Influenzavirus, responsables des différentes grippes – mutent très rapidement. Marta Luska et Michael Lässig, de l’Université de Cologne, proposent d’anticiper ces phénomènes d’émergence grâce à un modèle bio-informatique prédictif qui s’appuie sur l’adaptation génomique du virus.
Les chercheurs ont travaillé à partir de bases de données recensant les séquences – notamment celles des hémagglutinines – des virus H3N2 circulant depuis 1968. Ce modèle repose sur l’analyse de 3 944 séquences, corrélée à la fréquence et à la capacité d’adaptation de ces différentes souches. Ce dernier critère est évalué en fonction des changements d’épitopes mais aussi des modifications de séquences qui ne codent pas directement des protéines de surface. Un système qui permet de prévoir efficacement l’évolution des lignées virales H3N2 d’une année sur l’autre.
En testant leur modèle sur les épidémies postérieure à 1993, les chercheurs ont ainsi pu prévoir, rétrospectivement, 113 émergences de lignées H3N2 sur 121 et 51 déclins sur 67. Ils estiment que ce modèle bio-informatique pourrait être adapté à d’autres types de grippe, notamment aux souches potentiellement pandémiques H5N1 et H7N9. Ce type d’approche, intégrant les aspects génomiques à la veille épidémiologique, semble aussi appelé à participer à l’élaboration annuelle des vaccins contre la grippe saisonnière.

Luska M, Lässig M (2014) Nature, doi:10.1038/nature13087

La souche virale H3N2.
© C Goldsmith CDC/ EL Palmer ; ML Martin via Wikimedia Commons

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