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Le chromosome Y prend un coup de vieux

mercredi 6 mars 2013

par Agnès Vernet

Découverte fortuite, une lignée du chromosome Y serait plus ancienne que l’homme moderne lui-même.

Les grands projets de génétique collaborative regorgent de surprises. Un américain de Caroline du Sud remet ainsi en cause certaines théories de l’évolution de l’espèce humaine en décidant simplement de participer au Projet génographique mené par National Geographic. Les généticiens en charge de cette initiative privée sont contraints de capituler devant les échantillons de cet individu : il ne possède aucun polymorphisme simple nucléotide connu pour le chromosome Y ! Pour séquencer le mystérieux chromosome, ils se sont adressés à la société Family Tree DNA, qui a fait appel à l’Université d’Arizona pour élucider ce cas.
Les résultats relient ce chromosome Y a une lignée très rare et ancienne. Des séquences similaires sont identifiées chez les Mbo, une petite communauté du sud-ouest du Cameroun. Ensemble, elles dessinent une lignée inédite du chromosome Y. La datation de cette lignée, via des méthodes statistiques basées sur les taux de mutation, aboutissent à une divergence datant d’il y a 300 000 ans. Or cette date correspond à celle qui marque, au plus tard, la séparation de la branche qui donnera notre espèce, Homo sapiens, de celle des futurs hommes de Néanderthal. À titre de comparaison, les premières traces d’hommes anatomiquement modernes datent d’il y a 150 000 à 100 000 ans. Cette lignée du chromosome Y est donc la plus ancienne jamais identifiée.
Sa découverte met en en contradiction certaines hypothèses sur la diversité du chromosome Y. Les modèles purement linéaires ne suffisent pas à expliquer la persistance de cette lignée dans la population. Les généticiens de l’Université d’Arizona observent que les séquences de ce chromosome Y inédit sont variables et n’ont pas été transmises aux porteurs par un grand-père commun. D’autres mécanismes seraient donc nécessaires. Ils suggèrent que les communautés humaines isolées conservent une forme importante de diversité génétique.
Enfin, avec la montée en puissance des appels à participation pour la construction d’arbres phylogénétiques mondiaux, attendons nous à la découverte d’autres lignées peut-être plus rares encore.

Mendez FL et al. (2013) Am J Hum Genet,
doi:10.1016/j.ajhg.2013.02.002

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