Accueil du site > TECHNOBIO > Nanomanipuler l’ADN pour mieux comprendre sa réparation

Nanomanipuler l’ADN pour mieux comprendre sa réparation

mercredi 12 septembre 2012

par Agnès Vernet

L’Institut Jacques Monod dirige des recherches visant à décrire en détail la réparation de l’ADN en temps réel. Petit aperçu des premiers résultats.

On connaît encore mal la séquence fine des événements permettant la réparation de l’ADN dite « transcriptionnellement couplée » ou TCR (Transcription-coupled repair system). Dans cette situation, l’ARN polymérase est bloquée dans sa lecture par une anomalie, généralement encombrante comme la création d’un pont thymine-thymine inadéquat, et une cascade de molécules se relaient pour réaliser la réparation. Un collectif international de biologistes, mené par l’équipe de Terence Strick et son étudiant Kevin Howan de l’Institut Jacques Monod (CNRS - Université Paris Diderot) à Paris, a pu décrire les premières étapes de ce processus grâce à la nanomanipulation de molécules individuelles, une technique permettant de suivre en temps réel les interactions autour d’une molécule unique d’ADN issue d’Escherichia coli. Cette méthode mesure, par vidéomicroscopie, les variations de conformation d’une molécule unique d’ADN greffée à une plaque de verre d’un côté et à une microbille magnétique de l’autre.
L’ADN ainsi nanomanipulé permet de détecter la progression d’une ARN polymérase unique, de sa liaison avec les acides nucléiques pour former le complexe d’élongation jusqu’à sa dissociation après avoir rencontré le site de terminaison. En cas d’anomalie, une autre protéine devient un acteur central du processus : Mfd (mutation frequency decline).
Mfd appartient à une super famille d’ADN translocases ATP dépendantes. En cas d’anomalie gênant le passage de l’ARN polymérase, Mfd va à la fois libérer la polymérase et recruter les protéines de réparation. La nanomanipulation de molécules individuelles a permis d‘analyser finement la manière dont cette translocase dissocie le complexe d’élongation ARN polymérase/ADN.
Kevin Howan a ainsi montré que la Mfd agit via deux catalyses irréversibles ATP dépendantes : la première permet le décrochage de l’ARN polymérase et probablement de l’ARN en cours de transcription et la seconde libère Mfd de l’ADN. En effet, Mfd reste liée à l’ADN, ce qui permet de marquer le site portant l’anomalie, afin d’organiser l’assemblage de la machinerie d’exonucléases qui réaliseront le travail de réparation proprement dit.
Les biologistes espèrent ainsi élucider entièrement ce processus et pouvoir alors envisager des méthodes de réparation ciblée de l’ADN. Des techniques qui donneraient un nouveau souffle aux thérapies anticancéreuses et contre certaines affections héréditaires d’hypersensibilité aux rayonnements, comme le Xeroderma pigmentosum (enfants de la Lune).

Howan K et al. (2012) Nature, doi:10.1038/nature11430

SPIP Contact | Plan du site | Suivre la vie du site RSS 2.0 | mentions légales | logo Lavoisier logo facebook logo twitter Se connecter