Quand, en 2010, des chercheurs du CNRS et de l’Université de Poitiers mettent la main sur plus de 250 fossiles d’organismes pluricellulaires complexes dans un gisement sédimentaire près de Franceville, au Gabon, l’histoire du vivant est alors sur le point d’être réécrite (1). Vieux de 2,1 milliards d’années (Mda), ces fossiles démentent l’hypothèse d’une apparition des organismes complexes il y a 600 millions d’années (Ma). Leur histoire est en fait bien plus longue qu’on le pensait.
La poursuite des fouilles met au jour plus de 400 fossiles et c’est un véritable écosystème marin ancien que les biologistes ont sous les yeux (2). Composé d’organismes microscopiques et macroscopiques – certains spécimens mesurent 17 centimètres –, il révèle des modes de croissance très sophistiqués : les morphotypes sont variés, de forme lisse ou plissée, massive ou cloisonnée. D’après les analyses au microtomographe à rayons X, leur texture semble avoir été uniforme ou grumeleuse, de nature plutôt médusaire – molle et gélatineuse. Au vue de la pluralité des formes de vie représentées dans ces fossiles, il ne peut y avoir guère de doute : ces organismes ont évolué.
Tout comme l’émergence du biota comparable découvert en Australie – qui correspond à un pic d’oxygénation de l’atmosphère il y a 800 Ma –, l’émergence de la biodiversité ancienne découverte au Gabon semble associée à une hausse des taux d’oxygène entre -2,3 et -2 Mda. Un changement brutal d’atmosphère aurait ensuite éteint cette éruption de biodiversité.
Si cet écosystème est la plus ancienne trace de vie complexe découverte, rien ne dit que d’autres formes, ayant emprunté peut-être d’autres chemins évolutifs, ne sont pas encore cachées quelque part. L’entière richesse du vivant reste encore à dévoiler.
(1) El Albani A et al. (2010) Nature 466, 100-4
(2) El Albani A et al. (2014) PLoS One 9, e99438
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Ce microfossile carboné sphérique de type palynomorphe a été mis au jour dans un gisement sédimentaire près de Franceville au Gabon, en 2014. Il montre une structure ressemblant à une vésicule ouverte (en haut à droite).
© Abderrazak El Albani/CNRS Photothèque