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Une horloge planctonique

mercredi 16 juillet 2014

par Agnès Vernet

Au grand large, les espèces de micro-organismes qui composent le plancton coordonnent leur métabolisme et s’organisent autour d’un cycle journalier.

Les micro-organismes océaniques ne sont pas de petits îlots de vie isolés : ils forment une communauté au cœur de laquelle s’échangent les informations génétiques et se partagent nutriments. Des travaux réalisés par des chercheurs de la station océanique Aloha, au nord d’Hawaii, démontrent qu’ils synchronisent même leurs activités transcriptionnelles. Bien que les oscillations journalières ont été observées à travers tous les règnes du vivant, elles sont rarement mises en évidence chez des bactéries ou des archées en conditions naturelles. Les biologistes ont ainsi déterminé – de manière systématique, toutes les deux heures et durant trois jours – les profils de transcription d’une même population de plancton du gyre du Pacifique nord. Ces analyses répétées ont pu être réalisées grâce à un système robotisé de prélèvements et d’analyses des échantillons environnementaux.
Ces données révèlent une véritable chorégraphie transcriptionnelle quotidienne : les populations présentent des pics d’expression à des moments précis de la journée. Ce schéma se répète à l’identique le jour suivant, et celui d’après. Pour autant tous les individus n’expriment pas le même gène au même moment. Chaque espèce possède son propre profil transcriptionnel au sein duquel des gènes – impliqués dans le métabolisme ou la respiration – inscrivent leur expression dans un tempo plus large, qui n’est perceptible qu’à l’échelle de la population toute entière. Ce comportement semble spécifique de la vie au large : des travaux précédents avaient démontré que le métabolisme des micro-organismes côtiers n’est pas coordonné.
Que les cyanobactéries structurent leur activité selon un rythme journalier n’est pas une découverte : les organismes photosynthétiques carburent à la lumière. En revanche, la mise en évidence d’un cycle journalier chez des micro-organismes hétérotrophes est nettement plus inattendue. Quel est le mécanisme sous-jacent à cette horloge planctonique ? Pourquoi ce phénomène n’est-il observé que sur des populations vivant au large ? Permet-il d’optimiser les ressources ? D’autres travaux devront encore le révéler. Mais d’ici là, le cœur de l’océan continuera de battre en cadence.

Ottensens EA et al. (2014) Science 345, 207-12

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Plancton vu en microscopie électronique à balayage (fausses couleurs).
© Ed DeLong/Dave Karl/SOEST/Université d’Hawaii

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